La source Aïn el Mechaki

 

AIN LEMCHAKI est une source qui était autrefois considérée comme miraculeuse. Elle est située sur le territoire de Beni Foughal, à quelques centaines de mètres de l'oued Djendjen: donnant sur un oued descendant de Selma vers l'oued Djendjen, elle est située à 14 km de Texenna, au fond d'une sorte de ravin difficile d'accès.

 

On accède maintenant à cette source à partir de deux pistes- nouvellement ouvertes en 2009: l'une à 4 km environ de Selma (piste) et l'autre à partir de Kbaba (route en béton). Vous trouverez aussi ici une vidéo filmée  par Mokhtar Lamrani le long de cette deuxième piste.

Ci-dessous zoom sur la portion de carte concernée (la source est en orange, en bleu une portion du lit de l'oued Djendjen):

 

Etymologie du nom 'AIN LEMCHAKI' :  lemchaki est un synonyme du mot شكاية  "plainte, demande ".
Caractéristiques de la source:
- Fréquence: environ  une fois par heure.
- La source atteint son maximum d'effervescence en quelques minutes, et revient à son niveau d'écoulement normal: elle coule à grande eau, le jet est accompagné d'un bruit d'effervescence sous l'effet de la pression des gaz souterrains pendant environ une dizaine de minutes.
- L'eau est très froide, et jaillit d'un grand rocher.

 

Ci dessous, une photo du ravin au sein duquel jaillit Aïn El Mechaki:
(toutes photos prises en 2009)

 

Et voici encore deux photos montrant le débit de la souce à son maximum:

 

Cette source a été remarquée par les auteurs/voyageurs de tout temps.

On pourra par exemple citer deux passages dans le livre écrit au XIe siècle 'Description de l'Afrique Septentrionale' d'El Bekri:

passage n°1, page 82

"
Le médecin Abou-Djâfer Ahmed ibn Mohammed ibn Abi-Khaled dit, à propos d'une certaine source qui ne coule que les mois sacrés (1): chez nous au maghreb, dans le pays des Ketama, il y a une source bien connue qui s'appelle Aïn-el-Aoucat "la fontaine des heures" ; elle coule cinq fois dans l'espace d'un jour et d'une nuit, précisément aux heures des cinq prières.  Dans les intervalles elle ne coule pas". Plus loin, dans notre chapitre sur les ports de mer, nous indiquerons le lieu où cette source se trouve. Plusieurs personnes qui sont allées la voir et l'examiner en racontent la même chose que le médecin.
"
note de l'auteur (1) : le premier, le septième, le onzième, le douzième mois de l'année musulmane.
passage n°2, page 193
"
Le port de Sebiba (2), qui vient après celui de Bougie, est dominé par les montagnes des Ketama. L'Aïn-el-Aoucat "la fontaine des heures" , située au milieu de ces montagnes, est bien connue; quand chaque heure de la prière arrive, les eaux commencent à couler, et quand la prière est terminée elles s'arrêtent tout à fait.
De ce port les navires se rendent à Djezirat el Afia (3), île d'où l'on se dirige vers le port de Djidjel.
"
note de l'auteur (2): l'orthographe de ce nom nous paraît suspecte. Il désigne probablement la localité maintenant El-Mansouriya.
note de l'auteur (3): l'île ou plutôt les îlots d'El-Afiya sont à environ deux lieues ouest de Djidjel.

 

 

J'ai trouvé aussi mention de cette source dans un document plus récent, publié dans un des 'Recueils des Notices et Mémoires de la Société archéologique de la province de Constantine'(volume n°14 - année 1870):

 

" Tous ces restes du passé sont l'objet d'un respect superstitieux qui s'est transmis de génération en génération, malgré l'influence des marabouts cherchant à concentrer toutes les idées religieuses de leurs disciples vers les pratiques du culte musulman. Et, à ce sujet, nous ne dvons pas négliger de parler ici de la fontaine miraculeuse du pays des Ketama, signalée par El Bekri, géographe arabe du XIe siècle de notre ère. Cette fontaine est située chez les Beni-Four'al, au pied d'une montagne appelée El Meïda, et à côté du village d'El Aïoun; ses eaux, parfois abondantes, vont se perdre dans le lit de l'Oued Djendjen.

(ici l'auteur cite le texte d'El Bekri)


Aïn el Aoucat est designée aujourd'hui sous le nom de Aïn el Mechaki, la Fontaine des doléances. Les populations environnantes viennent en pélerinage se purifier dans ses eaux, qui, comme par le passé, coulent par intermittences.


Parfois, lorsqu'un crime avait été commis, on amenait encore naguère, au pied de la fontaine ceux qui étaient soupçonnés d'en être les auteurs: si les eaux ne coulaient pas dans un laps de temps assez rapproché, la culpabilité était établie.

La superstition, entretenue par les marabouts qui habitent auprès de la fontaine, faisait croire aux Kabiles que des anges lâchaient les eaux à des heures propices; mais ce phénomène s'explique facilement par l'action du soleil, qui en fondant la neige des pics voisins, alimente et fait déverser, à certains moments de la journée, le surplus des bassins naturels existant dans les entrailles de ces montagnes.

"

Remarque: vous trouverez ici  deux témoignages de lecteurs foughalis concernant cette source.

Mes remerciements à ML qui m'a fourni tous les renseignements récents contenus dans l'article, et qui est l'auteur des photos publiées dans cette page!

Références

 

Description de l'Afrique Septentrionale

par El Bekri (Bakrī, ʿAbd Allâh ibn ʿAbd al-ʿAzīz Abū ʿUbayd  - 1040-1094)

Traduction du Baron William Mac Guckin de Slane (1801-1878)

Imprimerie Impériale, Paris, 1859

Ce livre est téléchargeable ici sur le site de la Bibliothèque Numérique Gallica,

ou encore ici via Google Books

 

Recueil des notices et Mémoires de la société archéologique de la province de Constantine, 14e volume, 1870

Texte de Charles Féraud

Article: histoire des villes de la province de Constantine - Gigelli

Arnolet, libraire éditeur, Constantine.