Au sujet des Beni Foughal de Guelma: récit de Jean Joseph François Poujolat

Je vous présente aujourd'hui un livre publié en 1847: il s'agit du tome II d'un récit rédigé par Jean Joseph François Poujoulat, historien et journaliste, qui fut apparemment intégré pendant 5 ans au bataillon léger d'Afrique  en tant qu'observateur (je n'ai pas pu trouver plus de détails sur ce point. A-t'il accompagné les troupes pour témoigner sur la campagne d'Afrique?).

 

L'auteur relate en détail son parcours, nous fait une 'leçon de choses' et nous fournit son point de vue sur certaines des problématiques de la conquête de l'Algérie: son opinion est représentative de la façon de penser de l'époque. C'est ainsi qu'on trouvera dans le livre les passages suivants:

- la mission du peuple français comme peuple civilisateur et sauveur de la civilisation
- grandeur de la guerre d'Afrique
- notre guerre d'Afrique est une continuation des croisades
- la domination française en afrique considérée comme un pas vers l'unité morale et religieuse du genre humain


Ceci étant dit, on démarre la lecture tout en sachant qu'une bonne prise de recul va s'avérer nécessaire ...et on constate que ce livre reste néammoins intéressant, car on y trouve des éléments d'histoire, des récits de combats, des descriptions d'excursions, et une foule de détails et d'anecdotes.

 

Voici un extrait du taxte: il s'agit d'un récit de promenade à Hammam-Meskoutine dans lequel sont cités les Beni Foughal de Guelma:

 

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Le pays qui environne Hammam-Meskoutin est presque entièrement dépourvu de voies de communication; on ne saurait indiquer comme route le chemin difficile, à peine tracé, souvent impraticable, qui conduit de Bône à Constantine. Cependant, entre Mjez-Ammar et Hammam-Meskoutin, on vient de percer, pour les besoins de l'établissement thermal, à travers un pays accidenté et difficile, une route qui laisse peu à désirer.

Le territoire d'Hamman-Meskoutin est occupé par les Beni-Foughal; cette tribu peut mettre cent hommes sous les armes. Au delà de la rivière, au nord et à l'ouest, c'est la tribu des Beni Addi, forte de soixante hommes.

Ces deux tribus habitent en espace qui n'est nullement en rapport avec leur population; il suffirait, par son étendue, aux besoins d'une population centuple, puisqu'il occupe à peu près tout l'espace circonscrit entre les montagnes qui nous servent de limites et une partie de ces montagnes elles-mêmes.
C'est par elles que commence une série de tribus qui s'étendent vers l'ouest et occupent tout le massif de montagnes jusqu'au-delà de Collo et de Bougie.(ndlr: les Babors ne sont pas encore sous domination française, ce livre a été imprimé en 1847)

Les habitants de cette contrée sont doux et pacifiques; ils recherchent peu les relations avec nous, mais ils nous laissent, avec une entière sécurité, parcourir une étendue de plusieurs lieues autour de Hammam-Meskoutin.
...
Leur industrie est fort bornée; plusieurs tressent des nattes, quelques-uns sont meuniers, la plupart sont pasteurs et vivent uniquement du produit de leurs troupeaux. Je ne puis entreprendre ici de retracer leur moeurs; il n'y a rien ici qui soit propre à la localité.

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Vous trouverez aussi dans ce livre, en page 250, le récit du blocus de Djemila; ou comment trois mille homme issus des tribus environnantes entourérent et isolérent les troupes françaises pendant 5 jours. (Vu le grand nombre de guerriers ayant réalisé le blocus, il me semble qu'on peut penser raisonnablement que des hommes de la tribu des Beni Foughal ont pris partie aux combats).
Les troupes françaises se composaient du 3e bataillon léger d'Afrique, d'un détachement d'artillerie et d'un autre du génie, soit 670 hommes. Les soldats furent encerclés et leur seul point d'accès à l'eau fut coupé. Les militaires français réussirent à tenir grâce à quelques rations d'eau de vie, mais leur situation fut critique, d'autant plus que le nombre de munitions disponibles étant très restreint (45 cartouches par homme seulement).
Le blocus prit fin quand il apparut qu'une colonne envoyée par le général Galbois venait au secours des militaires encerclés: un émissaire avait réussi à échapper au blocus et à alerter l'armée française. Les 23e et le 26e régiment d'infanterie de ligne furent envoyés pour dégager les soldats français bloqués.

Ce récit ne mentionne pas l'année de ce blocus (je n'ai pas réussi à trouver le tomeI qui nous aurait permis de nous recaler temporellement): l'auteur indique en page 258 que le blocus dure du '18 au 22', et on sait en lisant la page 250 que nous sommes probablement en décembre. Pour déterminer l'année, ont peut utiliser à nouveau des infos de la page 250, où l'on apprend qu'en octobre de la même année l'armée française avait pris possession de Rusicada : après recherche, on voit que ces évènements ont eu lieu en 1838.

Références:
Etudes africaines - récit et pensées d'un voyageur (tome II)
Jean joseph François Poujoulat
Editeur: L. F. Hivert, Paris, 1847
Original de ce livre: université du Michigan
Ce livre est téléchargeable sur Google Books ici.