Description de l'Algérie - étude de Carette et Warnier, 1847

Voici  un court texte rédigé par Carette et Warnier au sujet des tribus algériennes.  Il ne s'agit pas là d'une étude détaillée, mais les auteurs abordent plusieurs points intéressants:

- ils utilisent la notion de 'tribu-colonies' que nous avons déjà vue ici, et les Beni Foughal sont cités en exemple pour leur essaimage à Guelma

- plusieurs implantations Ouled Attia sont mentionnées

- un détail a attiré mon attention: l'auteur indique qu'il existe une implantation Ouled Attia à la limite de la frontière marocaine, et que ce groupe est une tribu-colonie des Beni Snassen! Or les Beni snassen sont implantés vers Taza, là où se trouvent la ville de Tafoughalt, le Ras Fourhal, et le douar Beni Fourhal marocain!  J'aimerais donc avoir votre avis sur ce point : pensez vous qu'il s'agit d'un indice intéressant, ou seulement d'une coincidence?

- les texte est intéressant plus généralement, on remarquera un passage sur les Chorfa, ainsi que un passage sur la tribu des Arib - éléments à mettre en perspective avec ce que dit nous dit la tradition orale des Beni Foughal.

 

Passages mentionnant les Ouled Attia et les Beni Foughal:

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page 22 :

La tribu des Ouled Atia, qui ne s'éloigne pas du village El-Atof.


page 26-27:

Les colonies libres conservent presque toujours, avec le nom de la tribu-métropole, la trace de leur origine; mais la cause qui a déterminé quelques familles à s'éloigner du sol natal n'est pas toujours facile à trouver.

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Dans la province de Constantine, presque toutes les tribus qui habitent la partie du massif méditerrannéen voisine de la mer ont des colonies dans la partie supérieure des vallées.

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C'est ainsi que les Oulad Atia, situés aussi au cap Seba-Rous, ont une colonie considérable sur la route de Philippeville à Constantine dans la vallée supérieure du Safsaf, une autre sur l'Oued Ziad et une troisième à Aïn-Morkha; ces deux dernières sont contigües au lac Fzara, près de Bône.

Le cercle de Guelma est lui-même une agglomération de tribus-colonies, venues, les unes du Nord, les autres du Sud; les unes des environs de Djidjeli, les autres des pentes de l'Aurès, dans le massif intérieur. Aussi les noms des principales tribus de ces deux contrées se retrouvent-ils dans le cercle de Guelma; tels sont, pour l'Aurès, les Beni Oudjana, les Achêch, etc; pour les environs de Djidjelli, les Beni Foughal, les Beni Kaïd, les Beni Ahmed, les Beni Hacen, etc...


page 29:

La province d'Oran présente en général moins de traces de déplacement que les deux autres.

Cependant on en retrouve encore quelques unes:

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Les Oulad Atia et les Beni Menghouch Thata, situés à l'extrême frontière de l'Algérie, au point où commence la côté du Maroc, sont deux colonies des Beni Snacen, tribu du Maroc.

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Extrait parlant des Chorfa - pages 37 et 38 :

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L'origine générale de ces tribus religieuses mérite d'être signalée. Lorsque deux tribus considérables sont depuis longtemps en guerre, il arrive souvent que les voisins, affligés d'une lutte dont ils souffrent eux-mêmes, invoquent, pour y mettre fin, l'assistance des marabouts. La tribu religieuse à laquelle ils s'adressent commet alors quelques uns de ses membres pour opérer la réconciliation. Les arbitres s'établissent toujours entre les deux tribus ennemies, sur une zône mitoyenne, laissée inculte et devenue vacante du fait de leurs dissentions. Après la réconciliation, il n'est pas rare de voir les médiateurs, cédant aux instances des deux tribus, former un établissement définitif là où ils étaient venus pour une misison passagère, et donner naissance à une tribu qui porte leur nom. C'est de cette manière que la plupart des colonies religieuses se sont formées.

La trace de cette origine se retrouve d'ailleurs dans la position qu'elles occupent généralement.

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Ainsi, sur tous les points où les traditions locales signalent de longues luttes intestines, on trouve des colonies de marabouts.

Une des particularités qui se rattachent à ces colonies religieuses est celle des Cherfa ou chérifs. Les tribus de chérifs se rencontrent partout. Il en existe dans les trois provinces de l'Algérie; c'est un chérif qui occupe le trône du Maroc. La tradition populaire les regarde tous comme issus de la famille du prophète; mais elle leur assigne aussi un berceau commun en Afrique, de sorte que toutes ces tribus de chérifs paraîssent être autant de colonies sorties d'une même métropole. Le point de départ de toutes ces émigrations est une oasis appelée Saguit el Hamra, située au sud le l'Ouad-Noun.

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Et pour finir, un exemple de tribu ayant effectué un déplacement considérable au travers de l'histoire:

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Un des déplacements les plus remarquables, autant par l'étendue de la migration que par les circonstances qui l'ont accompagnée, est celui des Arib, dont la métropole occupe, par le 28e degré de latitude, la partie la plus méridionale du Sahara marocain. A une époque qu'il serait difficile de préciser, des dissensions intestines forcèrent une partie de cette tribu de s'éloigner du sol natal. Elle s'avança alors vers le nord-est  et vint s'établir sur les confins du sahara algérien; là de nouvelles contestations avec les tribus voisines déterminèrent un nouveau mouvement vers le nord; et la colonie des Arib arriva ainsi vers le Hodna; puis elle passa dans le massif méditerranéen, et vint s'établir, par suite d'un arrangement avec les tribus qu'elle déplaçait, dans la vallée supérieure de l'Ouad Akbou (rivière de Bougie).

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Vous pouvez télécharger ce document ici.

 

Références:

Description et division de l'Algérie

Auteurs: Carette et Warnier

Librairie Hachette, Paris, 1847